État des lieux de la recherche en Afrique
Avec moins de 2% des publications scientifiques par année, l’apport de l’Afrique dans la recherche mondiale demeure marginal en dépit des nombreuses potentialités offertes par ce continent. Cependant, malgré les difficultés diverses, quelques pays tirent leurs épingles du jeu. En 2006, les États membres de l’Union Africaine ont décidé de consacrer au moins 1% de leur Produit Intérieur Brut (PIB) à la recherche. Il revient donc aux décideurs publics et privés de tirer profit de la croissance économique actuelle du continent pour soutenir la recherche de manière pérenne.
La productivité scientifique de l’Afrique est évaluée à 41.583 publications en 2011 (1), soit 1,8% du total mondial. Le continent, dans son ensemble, fait à peine mieux que Taiwan (15e mondial) et moins bien que les Pays-Bas (14e). Cette portion incongrue de publication s’explique par des faiblesses d’ordre logistique, notamment le manque de financements, d’équipements, de ressources humaines, de réseautage et de synergies entre les centres de recherche. Fort de ce constat, les pays membres de l’Union Africaine ont adopté en 2006 une initiative qui visait à augmenter les financements de 0.2% du PIB à 1%, contre 2% dans les pays développés. En Afrique subsaharienne, en 2007, l’Afrique du Sud, le Malawi et l’Ouganda étaient les seuls pays à avoir atteint ce seuil minimum fixé par les pouvoirs publics. Dans de nombreux pays, les financements dépendent encore, en grande partie, des donations internationales.
Disparités intra-africaines
Il faut souligner que des disparités existent aussi à l’intérieur du continent. Les pays les plus performants étant l’Afrique du Sud (10.133 publications), l’Egypte (8.177), la Tunisie (4.322), le Nigeria (4.063), l’Algérie (2.653) et le Maroc (2.210). Le pays qui publie le moins est Sao tomé & Principe (4). Il a aussi la particularité d’avoir une très faible population, un facteur non négligeable pouvant expliquer cette performance.
Mais ces inégalités résultent beaucoup plus du manque de politiques publiques claires dans certains pays que des disparités en termes de PIB ou de taille de population. A titre d’exemple, la Tunisie qui est quinze fois moins peuplée que le Nigeria est plus productive que ce dernier; il en est de même du Gabon (104 publications) qui est plus performant que l’Angola (39), pourtant 10 fois plus peuplé et deuxième pays producteur de pétrole en Afrique subsaharienne après le Nigeria. La productivité scientifique, proportionnellement à la taille de la population, place ainsi la Tunisie en tête avec 402 publications par millions d’habitants, suivie des Seychelles (307), de l’Afrique du Sud (203), du Botswana (119) et de l’Egypte (102) ; le Gabon occupe la dixième place avec 69 publications par million d’habitants et Sao Tomé la 11e (67).
La recherche en Afrique manque beaucoup plus de soutien que d’inventivité
Et pourtant, les laboratoires africains ne manquent pas d’inventivité et d’innovation notamment pour lutter contre les maladies endémiques qui touchent le continent. Ces efforts se trouvent cependant, le plus souvent, anéantis par le manque de soutien politique et financier. Des études effectuées par l’ONG canadienne Mc Laughlin-Rotman Centre et publiées dans les revues scientifiques Science et BioMed Central présentent 25 technologies innovantes et peu coûteuses, mais qui sont « dormantes » par manque de financement ou suite à des décisions politiques à contre-courant.
Dans d’autres cas, il s’agit de problèmes de production, d’un déficit de compétences pour le contrôle de la qualité, la distribution ou la commercialisation. Parmi ces innovations, on peut noter un traitement pour la drépanocytose, une maladie génétique du sang répandue dans les communautés d’origine subsaharienne, développé par un laboratoire nigérian et qui a reçu une homologation de la FDA (Food Drug Administration) aux USA; des kits de diagnostic du sida et de l’hépatite B (Kenya) ou un antipaludique en cours de développement au Ghana.
Le modèle tunisien
Sur le continent, la performance de la Tunisie est un modèle car elle est en voie de réussir un pari de l’avenir qui consiste à associer le développement et la recherche scientifique. Tout d’abord, elle occupe la première place en termes de productivité scientifique proportionnellement à la population, le double de celle de l’Afrique du Sud qui est pourtant la première puissance économique du continent.
Ce dynamisme est le fruit d’une politique ambitieuse engagée depuis plus de dix ans qui instruit à développer des pôles technologiques spécialisés dans différentes régions du pays et qui sont en adéquation avec les potentialités régionales. Au sein des technopoles s’installent les centres de recherche, les entreprises et les industries de pointe. Ensuite, l’État finance plus de 90% de la recherche dans le pays, ce qui est rare en Afrique. Enfin, elle commence à récolter les fruits de ces investissements puisque la part de la recherche dans le PIB est passée de 0,43% en 1998 à 1,07% en 2006 (elle est inférieure à 2% dans l’Union européenne).
Les bases du développement scientifique en Afrique
Les faiblesses de la recherche en Afrique sont d’abord d’origine financière et infra-structurelle. Il est donc primordial que les États respectent l’engagement pris en 2006 afin de sortir de cette torpeur à l’origine des frustrations chez les initiateurs des projets innovants et prometteurs. Les potentialités non encore exploitées sont nombreuses. La faune, la flore ou la très riche médecine traditionnelle constituent des atouts majeurs permettant une nette démarcation de l’Afrique.
Par ailleurs, il faut saluer l’initiative de l’Union Africaine qui, dans le cadre du NEPAD (Nouveau Partenariat pour le Développement en Afrique), a planifié la mise en place de pôles de recherche sous-régionaux à travers le continent. En effet, compte tenu des limites des finances publiques nationales, il est plus que nécessaire de mutualiser les efforts pour plus de synergie entre partenaires intra-nationaux et inter-africains.
Aussi, il serait judicieux de mettre sur pieds des mécanismes de financements et des mesures incitatives pour attirer les investissements privés locaux ou étrangers, à l’image du Costa Rica qui a mis en place une politique audacieuse et attractive pour les firmes internationales opérant dans les biotechnologies et qui utilisent les ressources biologiques tout en respectant l’environnement.
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